
Nous arrivons à la dernière journée du festival. Les nuits sont courtes et les délais pour écrire les articles aussi ! Aujourd'hui rendez-vous au studio des Ursulines à 16 h 00 pour la séance jeune-public. L'occasion d'offrir au public jeunesse quelques découvertes dont ils se souviendront !
Cette séance sera suivi à 18 h 00 de la séance no 2 de la compétition Etudes qui nous réserve toujours quelques surprises.
Puis la séance de clôture aura lieu à 20 h 00 où les prix seront présentés avant la traditionnelle séance musicale et clips et films musicaux pour finir en beauté !
Avant de savourer ces trois dernières séances revenons sur la belle journée d'hier, riche en émotions, spectaculaires et découvertes.
Compétition horizon
La compétition horizon nous offre une série rares de courts-métrages de pays où l'animation est moins développée.

On notera le film "Loss" de Sonya Umanski et Alika Levinson (Ukraine, Israël) dans lequel une femme se fait opérer. A l'ambiance clinique de préparation de l'opération succède une sombre atmosphère onirique à la suite de l'anesthésie, atmosphère qui vire rapidement au cauchemar. L'opposition graphique de la salle d'opérations et du cauchemar est très intéressante. Ce cauchemar s'appuie sur un ressenti de la réalité ? Le film nous laisse avoir notre propre interprétation ...


Jesualdo Muvuma réalisateur angolais nous parlé de son expérience sur la réalisation du film 50 Kwanzas qu'il a réalisé en auto production.

Jesualdo Muvuma et Alexis Hunot - Photo Clément Martin

La réalisatrice marocaine Kawtar Waddi nous a présenté son film "Dyscalculia" qui suit le quotidien d’une personne souffrant de dyscalculie qui doit se débrouiller dans un monde rempli de nombres et de calculs.

Kawtar Waddi Piaff 2025 - Photo Clément Martin

2024 Dyscalculia Kawtar Waddi Maroc - source Image https://piaff.net/artist/dyscalculia/
Rencontre avec Boris Labbé et Lucas Fagin autour de Glass House
Nous avons eu ensuite la séance tant attendue, point d'orgue du festival pour certains, où Boris Labbé et Lucas Fagin sont venus nous parler de la conception du film Glass House. Nous avons eu la chance de voir la version intégrale de 40 minutes du film. Cette version se compose de 9 tableaux dont les images expérimentales utilisent aussi bien la 3D que l'IA générative.
Une présentation a suivi la projection du film animée par Marie-Pauline Mollaret avec un support abondamment illustré source de précieuses informations.
Le projet d'Eisenstein dans les années 20
Boris Labbé est parti des travaux du projet inachevé de S. M. Eisenstein pour Glass House (1926-1930). Ce projet s'articulait autour d'un bâtiment en verre totalement transparent d'où on ne peut rien cacher et où tout peut être par conséquent contrôlé. Cette architecture transparente permettait d'envisager des angles, des points de vue totalement innovateur et d'une stupéfiante modernité pour le cinéma de l'époque.

Concevoir la musique et les images animées
Le compositeur argentin de musique contemporaine Lucas Fagin est venu rencontrer Boris Labbé pour lui proposer de collaborer à ses projets. Cette collaboration a pris forme pour Glass House où Lucas Fagin a composé sa musique uniquement à partir d'images fixes avant d'échanger avec Boris Labbé pour chaque tableau. Généralement la musique était en avance sur l'image ce qui permettait à chacun de s'adapter.


Au départ Lucas Fagin a éprouvé le besoin de faire un schéma graphique des séquences musicales qu'il souhaitait afin de poser une première succession de phrases. Le musicien rejoint là les préoccupations des "Arts de synthèse" qui se crée à partir d'un langage formel qu'il s'agissent d'une partition qui place des notes avec ces durées dans le temps ou des "time lines" en animation qui place le son et l'image dans leur évolution dans le temps. L'interprétation et l'enregistrement suivent seulement.

On peut citer comme exemple les times lines de Pierre-Emmanuel Lyet, première appropriation des symphonies de Bethoven pour sa série en neuf épisodes " Luz et les solidos" (1).



On peut illustrer ce besoin d'analyse dans les "Arts de synthèse", ces Arts où on part de rien, seconde par seconde, image par image, mesure par mesure, cette fois ci avec une "Time line" de Norman Mclaren pour sur 133 secondes du film en pixilliation de Norman McLaren "A chairy tail" 1957.

Glass House avant d'être un film de 40 minutes a fait l'objet d'un spectacle "ciné-concert" avec l'Orchestre Cairn. Lucas Fagin nous expliqué que la musique de Glass House écrite pour l'orchestre Cairn devait forcément faire l'objet d'une partition pour les musiciens et le chef d'orchestre. Pour le spectacle il pouvait y avoir jusqu'à 10 à 17 secondes d'écart suivant la direction d'orchestre, les parties du film étaient donc lancées manuellement en suivant également la direction d'orchestre qui devenait ainsi un chef d'orchestre multi média !


Concernant la conception du film, après les rencontres en cours de réalisation entre les deux créateurs qui permettait une première étape de "synchronisation" de leurs travaux, l'orchestre interprétait la musique pour l'enregistrer. Suite à l'enregistrement il fallait parfois reprendre un cycle de conception complet sur les images animées et la musique. Une fois le travail effectué il fallait réécrire la partition pour la faire de nouveau interpréter.
Concevoir les images animées
Le processus de création des images animés s'est fait à partir d'un travail de préparation de Boris Labbé sans cadre précis de conception si ce n'est l'inspiration sans scénario défini au préalable, des images fixes et un thème permettaient d'orienter chacun des neufs "mouvements" de l'œuvre. Pour faire ce film en 8 mois seulement il a fallu avoir recours à l'Intelligence Artificielle générative pour générer des successions d'images.
Le principe de l'intelligence artificielle est de créer des textes, des images, voir des séquences animées à partir de "prompt" contenant du texte ou des images ou les deux. En ce qui concerne une image le principe de l'IA générative et qu'elle modifie une image à partir d'une autre image. Des scènes construites en 3 D sont également combinées à ces images générées par l'IA. Boris Labbé a travaillé avec des outils "open source" qui permettent de créer sur son propre poste de travail et non dans un cloud qui n'est pas souverain. Le poste de travail calculait ainsi toutes les nuits. Gamca Animation reviendra en détail sur ce sujet.

Un film et des émotions
Le premier mouvement démarre par une brusque entrée en matière de la musique, on est prévenu une posture contemplative ne suffira pas au spectateur, il faut rester aux aguets pour pénétrer ce monde de verre et de transparence. Silhouettes en mouvements dans des jeux de transparences, mannequins serrées dans des cages aux parois translucides, lents mouvements de caméra "Tarkoskien" dans des structures architecturales, mondes graphiques en vibration, motifs générés par des machines, cadres variables sont autant d'élément fascinants qui pourraient faire partie d'une Pub Dior du 21e siècle pour des extra-terrestres ou pour une "Samaritaine" martienne du 22e siècle.
Le végétal, l'espace, la faune avec ses oiseaux ne sont pas absents au fur à mesure que le réalisateur nous élève vers un ciel accueillant.
Le temps passe trop vite, on n'a qu'une envie de revoir ce film si riche mais le reverra-t-on ?
Festival oblige je dois foncer, en velib :-), au Piaff pour la séance jeunesse programmée par Marie Pauline Mollaret. Gamca Animation reviendra sur le programme expérimental d'hier et le travail de Boris Labé. Nous prions également nos lecteurs de nous excuser des imperfections qui subsistent suite à des nuit courtes et 5 articles en 5 jours ! :-)
(1) 92 Fontevraud 2024 : Où la musique rencontre le cinéma
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